Les résultats des élections législatives françaises, qui n'ont pas abouti à un vainqueur clair après le second tour dimanche, ont plongé le pays dans une incertitude et ouvert la porte à diverses spéculations quant à la formation du nouveau gouvernement.

Les élections ont produit trois forces principales : la Nouvelle Union Populaire Écologique et Sociale (NUPES) de gauche (182 sièges sur les 577 de l'Assemblée nationale), la coalition centriste présidentielle (163 sièges, en recul de 55 par rapport aux élections de 2022), et le Rassemblement national d'extrême droite (143 sièges), tandis que les sièges restants ont été répartis entre d'autres partis. Pour obtenir la majorité et prétendre à la présidence du gouvernement, un parti devait obtenir 289 sièges.

Ces résultats ont rendu la scène politique française floue. La NUPES, comprenant La France Insoumise de l'ex-trotskiste Jean-Luc Mélenchon, a revendiqué le droit de former le nouveau gouvernement en tant que bloc ayant obtenu le plus grand nombre de voix, se félicitant d'avoir empêché l'extrême droite dirigée par Marine Le Pen de prendre la première place.

Emmanuel Macron, qui a poussé un soupir de soulagement en voyant les centristes arriver en deuxième position et l'extrême droite reléguée en troisième, ne semble pas pressé de nommer quelqu'un pour former le nouveau gouvernement. Il a demandé à son Premier ministre, Gabriel Attal, de diriger un gouvernement intérimaire en attendant que le brouillard se dissipe après l'une des élections les plus étranges de l'histoire de la Cinquième République.

De nouveau, Macron tentera de manœuvrer et de jouer sur les contradictions entre les partis de la NUPES, qui comprend, outre La France Insoumise, les socialistes et les écologistes. Bien que Mélenchon soit la figure la plus charismatique et en vue, il est peu probable que les socialistes et les écologistes acceptent qu'il soit le candidat de la NUPES pour le poste de Premier ministre, tout comme Mélenchon ne tolérerait pas qu'un candidat lui soit imposé.

Macron n'a pas beaucoup de temps pour désigner le nouveau Premier ministre, avec lequel il devra cohabiter pour le reste de son mandat présidentiel. Il est bien conscient que le programme de la NUPES, comprenant l'augmentation des salaires, la réduction de l'âge de la retraite à 60 ans, l'imposition des grandes entreprises et la reconnaissance de l'État palestinien, est difficile à mettre en œuvre.

C'est une agenda diamétralement opposée à tout ce que Macron a défendu depuis son premier mandat en 2017, rendant une "cohabitation" difficile voire impossible avec un Premier ministre portant un tel programme.

Les options de Macron sont limitées. S'il souhaite contourner la gauche dans la formation du gouvernement, la nomination d'une personnalité centriste est presque impossible ou vouée à l'échec, en raison du manque de députés pour garantir une base parlementaire solide, même si le parti républicain gaulliste acceptait de s'allier avec lui, ce que les républicains refusent.

Jusqu'à présent, de nombreux politiciens et analystes réfléchissent encore aux raisons qui ont poussé Macron, la nuit du 9 juin, à convoquer des élections anticipées après les résultats des élections européennes, où l'extrême droite est arrivée en tête et son parti Renaissance en troisième. Bien qu'il ait justifié cette décision pour "clarifier la situation politique", celle-ci n'a fait que compliquer les choses.

L'impasse politique actuelle est de la propre création de Macron, qui a causé cette situation pour la France et pour lui-même. Bien que l'extrême droite ait reculé entre les deux tours des élections législatives et européennes, ce recul est attribué à ce que l'on appelle en France le "vote tactique", visant à éloigner l'extrême droite du pouvoir.

Cela n'efface pas le fait que l'extrême droite a réalisé des gains importants dans la nouvelle Assemblée nationale, augmentant son nombre de sièges de 89 à 143, ce que Le Pen a considéré comme une "victoire différée", visant les élections présidentielles de 2027.

Jordan Bardella (28 ans), député européen du Rassemblement national, que Le Pen avait proposé pour le poste de Premier ministre en cas de victoire du RN aux législatives, a reconnu des "erreurs de campagne". Mais il a insisté sur le fait qu'une "vague montait, bien qu'elle ne soit pas encore assez haute", en référence aux nouveaux gains du RN.

D'ici aux élections présidentielles, le Rassemblement national, qui a "modéré" son discours ces dernières années, cherchera à renforcer son agenda axé sur la restriction de l'immigration, l'imposition de limitations aux résidents étrangers en France et la non-accès à la nationalité pour leurs enfants, ainsi que sur la promotion de l'identité nationale française contre la dilution dans l'Union européenne.

Dans un parlement divisé en trois blocs, Macron aura du mal à former le nouveau gouvernement, alors que le pays est à trois semaines seulement d'accueillir les Jeux Olympiques.

La France, deuxième économie de la zone euro et première puissance militaire de l'Union européenne, voit sa situation politique affecter l'ensemble du continent.

Seul le président américain Joe Biden a exprimé son soulagement face aux résultats en France, les sondages ayant prédit la victoire de l'extrême droite s'étant avérés faux, ce qui lui permet d'espérer que les sondages annonçant sa baisse de popularité face à Donald Trump seront également démentis lors des élections du 5 novembre.