Lors de la récente réunion du Conseil des ministres, les ministres des Forces libanaises ont appelé le gouvernement à clarifier son engagement pris dans la déclaration ministérielle concernant la stricte application de la résolution 1701 et le désarmement du Hezbollah. Ils ont demandé un calendrier de six mois à cet effet. Le Premier ministre a pris note de cette demande et l'a jugée positive, tandis que le Président de la République a répondu : « Chaque chose en son temps. »

Il est regrettable de constater que l'Iran et le Hezbollah n'ont pas modifié leur position ni leur stratégie dans la région et au Liban, l'Iran cherchant à asseoir son hégémonie régionale en exportant sa révolution et le Hezbollah dominant la scène intérieure libanaise. Il semble difficile, à l'heure actuelle, de prédire l'évolution de la situation dans la région. Cette impasse circonstancielle constitue un goulot d'étranglement qui rend impossible la recherche de solutions convergentes lorsque les stratégies et les objectifs divergent. Souvent, l'un des principaux acteurs utilise la surprise pour sortir de l'impasse. L'impasse politique imminente pourrait atteindre des niveaux encore plus élevés, car le nouveau mandat présidentiel bénéficie d'un soutien local, régional et international qui ne permettra pas à l'Iran ou à d'autres détracteurs d'entraver son déroulement. Chaque composante confessionnelle et politique du Liban souffre d'un manque de créativité, chacune pour des raisons qui lui sont propres : les chiites en raison des conséquences de la guerre ; les sunnites en raison de l'absence d'autorité claire ; les druzes en raison de la crise interne et de leur division entre Israël, la Syrie et le Liban ; et les chrétiens en raison de l'incertitude quant à leurs options politiques (rétablissement de l'autorité centrale, fédéralisme ou simple séparation ?). En attendant, le Liban n'est pas une priorité, malgré les discours français et américains sur l'espoir d'un Liban meilleur. Le monde est en ébullition et fait face à une recrudescence des combats entre les Houthis et les États-Unis, tandis que les actions iraniennes et israéliennes transforment la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU en une plaie ouverte plutôt qu'en une solution espérée. L'essence de cette résolution, qui appelle à un Liban libéré de tout groupe armé non étatique, n'a pas été pleinement respectée. Les forces armées libanaises n'ont pas besoin de plus de temps ni de davantage de troupes pour se déployer. Cela nécessite une réelle détermination du gouvernement à affronter le Hezbollah. C'est une décision que le gouvernement hésite à prendre, de peur de sombrer dans une guerre civile si la communauté chiite s'unit derrière ceux qui l'ont privée de sa représentation.

Montée des tensions et possibilité d'escalade

Les tirs de roquettes depuis le territoire libanais le 21 mars 2025 confirment cette affirmation, créant une situation extrêmement volatile avec un fort potentiel d'escalade.

Les conséquences immédiates sont une exacerbation des tensions entre Israël et le Liban. Les représailles israéliennes incluent des frappes importantes sur le territoire libanais, ce qui accroît le risque d'un conflit plus large. Dès que le Hezbollah ou l'Iran ont besoin de créer des tensions, des missiles sont prêts à être tirés. La forte probabilité d'implication du Hezbollah, même s'il le nie, fait craindre une confrontation plus large. En bref, alors que le pays est déjà confronté à d'importants défis économiques et politiques, et que la capacité du gouvernement libanais à maintenir le contrôle et à appliquer la résolution 1701 est soumise à une forte pression de la communauté internationale, ses efforts diplomatiques et ses appels à la retenue et au respect des résolutions de l'ONU ne peuvent se poursuivre indéfiniment. Malheureusement, dans la guerre américano-iranienne en cours, chacune des factions pro-iraniennes croit encore pouvoir gagner ou inverser le cours des événements à son avantage. Cette conviction rend possible une reprise de la guerre et accroît la tentation de lancer une frappe qualitative, similaire à celle du 7 octobre 2023, mais avec une portée internationale plus large, avec des solutions internationales dépassant les conséquences des récentes guerres mondiales au Moyen-Orient.

Seule une action rapide et énergique de l'État libanais peut surmonter ce problème. La question cruciale est la suivante : le gouvernement actuel et ses forces armées, ainsi que leurs nouveaux dirigeants, sont-ils capables d'y parvenir ?

La capacité des Forces armées libanaises à poursuivre leurs missions

La capacité des Forces armées libanaises (FAL) à mettre pleinement en œuvre l'accord de cessez-le-feu et la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU est une question complexe, qui repose sur plusieurs facteurs, tout en relevant les défis posés à leur autorité.

Un aspect fondamental de la résolution 1701 et de l'accord de cessez-le-feu est le désarmement de tous les groupes armés au Liban, à l'exception des Forces armées libanaises et des autres services de sécurité. Cependant, la présence et les capacités militaires du Hezbollah constituent un défi majeur pour la capacité des FAL à exercer leur autorité de manière unilatérale, tant que le gouvernement libanais n'aura pas adopté une position politique claire à son égard.

La capacité des FAL à mener à bien de nombreuses missions est affectée par plusieurs facteurs, tels que des ressources limitées et une dépendance au soutien international, notamment financier et militaire. De plus, la stabilité politique au Liban a de profondes répercussions sur le Front de libération arabe, qui a constamment besoin de la coopération de toutes les parties libanaises concernées pour fonctionner efficacement. Malgré les efforts considérables déployés par la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) pour se déployer dans le sud du Liban et maintenir la stabilité, la pleine mise en œuvre de la résolution 1701 demeure un défi permanent. En bref, les tirs de roquettes ont créé une situation extrêmement dangereuse. L'avenir dépend de la réaction des parties impliquées, du niveau d'intervention internationale, de la capacité du nouveau gouvernement syrien à consolider son contrôle et de directives claires du gouvernement libanais. Dans le cas contraire, le risque d'un nouveau conflit reste extrêmement élevé. Récemment, un phénomène nouveau est apparu sur la scène régionale : les manifestations palestiniennes (spontanées anti-Hamas ?) à Gaza, exigeant la fin des combats et le départ du Hamas de Gaza. Hier encore, nous apprenions que le Hamas venait d’exprimer son intention d’organiser des contre-manifestations en faveur de la mosquée Al-Aqsa, de la Palestine, etc.

Conflits au sein de la société

Ce phénomène suggère le début d'un conflit interne palestinien, dont l'issue est encore incertaine, mais il soulève indéniablement des questions quant à la représentation du Hamas comme unique interlocuteur des Gazaouis et suggère une solution palestinienne interne au conflit avec Israël.

Certains pourraient être tentés de généraliser ce phénomène (positif) au Liban, au sein de la communauté chiite. Nous savons par expérience que la volonté de l'État libanais de faire montre de sa force face au Hezbollah pour reconquérir son monopole sur l'usage de la force pourrait conduire à un ralliement des chiites autour de ce parti et à un déclenchement d'une guerre interne similaire à celle de février 1984… chose que l'État semble avoir évitée jusqu'à présent.

Nous, dans cet Orient hyper-confessionnel sur le plan identitaire, savons aussi que le seul remède aux maux des composantes confessionnelles captives par leurs représentants ne viendra que de l'intérieur de ces composantes. Ainsi, seule une rébellion chiite contre le Hezbollah et le contrôle du mouvement Amal sur la population chiite offriraient l'espoir d'une fin à la rébellion chiite contre l'État libanais et constitueraient une opportunité pour un nouveau départ réussi pour l'État...

Cet État libanais, aujourd'hui pris entre Charybde (la guerre avec Israël) et Scylla (la guerre civile), tel Ulysse (sa branche de figuier), s'emparerait de la branche de figuier de la mutinerie chiite interne pour sortir de l'impasse confessionnelle, reconquérir son autorité, monopoliser l'usage de la force et panser la plaie de la résolution 1701 en la mettant pleinement en œuvre