Alors que sa présidence touche à sa fin, le président Biden fait face à une série de défis, le plus récent étant le débat sur sa prétendue invisibilité, notamment face à la crise la plus urgente alors qu’il s’apprête à quitter ses fonctions : la possibilité d’un arrêt des activités de la plupart des agences fédérales non essentielles en raison d’un manque de financement. Une telle crise a déjà éclaté à plusieurs reprises au cours des quatre dernières années, mais Biden était alors actif et présent pour la résoudre avant qu’elle ne s’aggrave. Cette fois, cependant, son absence suscite de nombreuses spéculations.

Un autre défi est le retard potentiel dans la conclusion d’un accord de cessez-le-feu et la libération des otages israéliens détenus par le Hamas en échange de prisonniers palestiniens. Ces problèmes internes et externes résultent de l’influence exercée par le président élu Donald Trump et son allié Elon Musk sur les Républicains au Congrès et sur le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

Chaque administration américaine sortante s’acquitte de ses devoirs jusqu’à la fin, mais évite généralement de lier la future administration à des décisions qu’elle pourrait ne pas approuver. C’est ce que l’administration Biden tente de faire, notamment en facilitant une résolution temporaire au Congrès pour financer le gouvernement jusqu’après l’entrée en fonction de Trump. Cependant, Trump et Musk ont ordonné aux Républicains de la Chambre de bloquer le projet de loi, qui a pris des mois à être négocié, en arguant qu’il incluait des financements pour des projets chers aux Démocrates.

Les administrations sortantes cherchent également à marquer des réussites en politique étrangère dans leurs derniers jours. Par exemple, l’administration Biden a négocié une cessation des hostilités renouvelable de soixante jours au Liban. L’envoyé présidentiel américain Amos Hochstein a joué un rôle clé dans cet accord, équilibrant les priorités actuelles de Biden avec d’éventuelles modifications sous la direction de Trump. Biden peut revendiquer le mérite de cet accord, mais Trump aura le pouvoir de le confirmer ou de le modifier après sa prise de fonction.

Le secrétaire d’État Antony Blinken a salué cet accord dans une interview publiée par Foreign Affairs le jeudi 19 décembre, le qualifiant de victoire pour les politiques de Biden. Blinken a souligné que le Hezbollah n’avait d’autre choix que d’accepter les conditions fixées par les États-Unis.

Blinken a également rejeté les allégations selon lesquelles la détérioration de la situation au Moyen-Orient et la réduction du soutien à l’Ukraine constituaient les plus grands échecs de l’administration Biden. Il a affirmé que Washington avait fourni à l’Ukraine des ressources suffisantes pour l’année à venir et l’avait équipée pour négocier en position de force si nécessaire.

Concernant les développements au Moyen-Orient, Blinken a reconnu que le grand perdant était l’axe iranien. Le Hamas, qui visait à déclencher une guerre sur plusieurs fronts contre Israël, a échoué, entraînant des déplacements massifs et la destruction à Gaza. Les efforts du Hezbollah pour renforcer son image en ouvrant un front de soutien à Gaza depuis le sud du Liban se sont retournés contre lui, entraînant des destructions dans le sud du Liban, la vallée de la Bekaa et le sud de Beyrouth, tout en coûtant au Hezbollah ses dirigeants les plus importants. L’Iran a également subi un revers en étant davantage exclu de l’accès à la Méditerranée après la chute du régime d’Assad.

Bien que le président Biden ait promis de maintenir cette présence, rien ne garantit que son successeur suivra la même politique.

Cependant, la politique américaine au Moyen-Orient reste incomplète sans aborder la question palestinienne. Pour Washington, tout accord de cessez-le-feu et toute libération d’otages représentent des succès à court terme. À long terme, Washington envisage deux voies possibles pour Israël :

Une intégration dans la région grâce à des accords de paix, une normalisation des relations, une revitalisation économique et des échanges commerciaux, qui pourraient réduire les préoccupations sécuritaires.

Une continuation des cycles destructeurs observés au cours des quatorze derniers mois, aggravant les souffrances humaines et les destructions matérielles.

On compte environ sept millions de Juifs et cinq millions de Palestiniens en Israël et dans les territoires palestiniens. Blinken reconnaît cette réalité démographique immuable et plaide pour une coexistence et une autodétermination palestinienne dans un cadre qui garantit la sécurité d’Israël.

Cette vision ne trouve cependant pas un large écho en Israël. L’ancien chef du renseignement militaire Amos Yadlin et l’expert en sécurité nationale Avner Golov ont écrit dans Foreign Affairs que trois visions concurrentes existent dans la région :

Le Hamas visait à déclencher une guerre sur plusieurs fronts, mais ses efforts ont été sporadiques et manquaient de sérieux.

Le Hezbollah cherchait une guerre d’usure pour affaiblir économiquement Israël, mais cette stratégie a échoué face à la réponse israélienne.

Les États-Unis recherchaient la paix et la stabilité via une solution à deux États.

L’échec de ces visions a ouvert la voie à une nouvelle vision : celle d’Israël. Avec le soutien des États-Unis et une implication limitée de l’Iran, des Houthis et de l’Irak, Israël exploite les dynamiques régionales pour remodeler le Moyen-Orient. Cependant, pour que cette vision réussisse, Israël doit coordonner ses efforts avec des pays voisins comme la Jordanie, l’Égypte, les États du Golfe et ses partenaires européens.

La question demeure : quelle place pour les Palestiniens dans ce nouvel ordre ? Israël insiste sur des réformes palestiniennes pour éliminer la corruption et l’extrémisme, et exige la démilitarisation complète de Gaza avant tout effort de reconstruction. De plus, les Palestiniens doivent reconnaître Israël comme un « État juif. »

Dans ces conditions, on ignore qui représenterait les Palestiniens dans les négociations, selon quel cadre politique, et quels droits ils obtiendraient en retour.

L’offensive du Hamas et la réponse israélienne ont offert aux États-Unis une opportunité de renforcer leur présence militaire au Moyen-Orient. Les forces américaines sont désormais déployées dans des détroits stratégiques et sur des bases militaires dans les États du Golfe. Bien que le président Biden ait promis de maintenir cette présence, rien ne garantit que son successeur suivra la même politique.