Depuis le 23 novembre 2024, la guerre au Liban a pris une tournure tragique, plongeant les enfants libanais dans un cauchemar quotidien.

Comment parler aux enfants ? Comment les rassurer ?

Comment leur expliquer la guerre et le fait que plus d’un million de personnes ont dû fuir leurs maisons au Sud-Liban, dans la Békaa et dans la banlieue sud de Beyrouth, envahissant les écoles publiques pour y trouver refuge ?

Al-Safa News s'est entretenu avec la psychologue clinicienne et psychothérapeute Zeina Bou Kheir, qui apporte des conseils aux parents pour traverser cette période difficile avec leurs enfants.

la psychologue clinicienne et psychothérapeute Zeina Bou Kheir

Adopter des attitudes créatives et rassurantes

Pour préserver la santé mentale de l’enfant, Zeina Bou Kheir recommande aux parents d’adopter des réponses adaptées en fonction de l'âge, de la situation géographique de l’enfant, et de son exposition directe ou indirecte à la guerre ou aux médias.

Elle souligne l'importance d’expliquer à l’enfant que sa sécurité est la priorité des parents. Ils devraient également l’accompagner dans l’expression de ses émotions et de ses pensées, sans minimiser ni exagérer ses paroles.

Selon Bou Kheir, les parents peuvent aussi le rassurer en lui disant : « Nous avons déjà traversé des situations similaires, nous nous en sommes sortis, et bientôt tout redeviendra normal. »

Créer une routine rassurante et encourager les activités

En cas de déplacement ou d’interruption scolaire, il est crucial de rétablir une routine sécurisante. Le sommeil joue un rôle essentiel dans cette routine, associé à des activités apaisantes comme lire un conte ou discuter avec les parents. Si l’enfant est encouragé à pratiquer un sport ou une activité, les parents doivent montrer l’exemple.

Elle rappelle également l’importance de souligner qu’il existe des associations et des personnes prêtes à offrir leur soutien en cas de besoin.

Limiter l’accès aux médias et gérer son propre stress

Zeina Bou Kheir recommande de limiter l’accès des enfants et adolescents aux réseaux sociaux et aux informations télévisées afin de les protéger des images choquantes. Elle invite aussi les parents à restreindre leur propre consommation d’informations et à éviter de montrer leurs émotions devant leurs enfants. Une anxiété excessive chez les parents pourrait en effet affecter le bien-être psychologique de leurs enfants.

Donner des explications simples et rassurantes sur la guerre

Pour répondre aux questions des enfants sur la guerre et le déplacement, les parents devraient utiliser des réponses simples comme :

« Certaines personnes essaient de prendre le pouvoir par la force, mais nous ne sommes pas d’accord, c’est pourquoi nous nous protégeons. »

« Nous veillons à ta sécurité ; nous rentrerons bientôt chez nous. Pour l’instant, nous sommes dans un endroit sûr. »

Elle conseille également de ne pas réagir de manière précipitée en élaborant des plans à long terme, comme quitter le pays ou se ruer dans les supermarchés.

Gérer les traumatismes et fournir un suivi personnalisé

« Si un enfant est témoin d’un événement traumatique, un suivi personnalisé est nécessaire, car chaque enfant réagit différemment », insiste Bou Kheir.

Avec la fermeture des écoles, les enfants passent désormais tout leur temps avec leurs parents. Zeina Bou Kheir souligne l’importance de continuer à les éduquer et à les protéger pendant cette période difficile. Maintenir une routine quotidienne peut créer un sentiment de sécurité : se lever à la même heure, prendre le petit-déjeuner en famille, lire, jouer et partager des moments ensemble.

L’éducation comme outil de stabilité

Continuer les études et les apprentissages est un moyen efficace d’atténuer les tensions du quotidien.

Le soutien émotionnel et psycho-social : une nécessité

Face à l’impact psychologique de la guerre, les parents doivent offrir un soutien émotionnel et psycho-social à leurs enfants, en se montrant attentifs à leurs émotions et à leur bien-être.

Prévenir le stress post-traumatique (SSPT)

Enfin, Zeina Bou Kheir met en garde contre le trouble de stress post-traumatique (SSPT), qui peut survenir après un conflit. « Le SSPT se manifeste par une anxiété intense, poussant l’individu, enfant ou adulte, à revivre en permanence son traumatisme à travers des hallucinations ou des cauchemars. Les effets psychologiques de la guerre peuvent impacter toute la famille et se répercuter sur les générations futures », conclut-elle.