Alors que les États-Unis ouvrent un vaste chantier diplomatique, les priorités stratégiques se précisent : obtenir d’abord un cessez-le-feu en Ukraine, avant de se concentrer sur l’Iran, que ce soit par la voie diplomatique ou par une action militaire. Ensuite, Washington entend redéfinir l’avenir du Moyen-Orient et d’Israël dans la région, en tranchant le sort du Liban et de la Syrie, tous deux sous le feu israélien, dans leurs réalités respectives.

Au Liban, la guerre israélienne est loin d’être terminée. Israël continue de violer l’accord de cessez-le-feu en maintenant son occupation des zones frontalières conquises durant la guerre et en poursuivant ses frappes aériennes au sud et au nord du Litani, jusqu'à la Bekaa. Ces opérations s’appuient sur les « garanties » américaines qui lui permettent d’éliminer la capacité militaire du Hezbollah. Ce dernier, quant à lui, fait face à une guerre politique interne alimentée par des tentatives de pression et de blocage de l’aide destinée à reconstruire les infrastructures détruites par la guerre, dans l’espoir d’affaiblir son soutien populaire.

Mainmise américaine sur le Moyen-Orient ?

Dans un contexte de tractations diplomatiques intenses, les grandes lignes d’un plan américain pour le Moyen-Orient commencent à se dessiner. Ce projet inclut une prise de contrôle stratégique de plusieurs pays en crise : Liban, Syrie, Irak, Yémen, ainsi que la Cisjordanie et Gaza, tandis que les autres États de la région restent des alliés historiques de Washington.

Le basculement du régime syrien semble avoir marqué le début de l’exécution de ce plan. Vladimir Poutine en aurait amorcé l’application, et Donald Trump en assurerait l’achèvement. Ainsi, alors que Bachar al-Assad se rendait à Moscou, les factions djihadistes de “Hayat Tahrir al-Sham”, dirigées par Abou Mohammad al-Joulani, lançaient une offensive depuis Idlib vers Hama et Alep. Assad, après un bref retour à Damas, aurait quitté la capitale sans résistance pour se réfugier à la base russe de Hmeimim avant de s’exiler en Russie.

En parallèle, Volodymyr Zelensky était convoqué à la Maison-Blanche pour une réunion houleuse avec Donald Trump, conclue par une expulsion sans précédent du président ukrainien. À l’ordre du jour figurait un accord sur les ressources minières ukrainiennes, permettant à Washington d’obtenir la moitié des revenus du secteur en échange de son soutien à Kiev dans la guerre contre Moscou. Ce projet s’inscrirait dans le cadre d’un règlement global du conflit russo-ukrainien, qui pourrait être finalisé lors d’un sommet entre Trump et Poutine en Arabie saoudite. Un doute plane toutefois sur la présence de Zelensky dans cet accord, au regard des rumeurs sur une éventuelle démission et un exil en France.

Vers un nouveau rapport de force au Proche-Orient

Le rapprochement israélo-arabe à travers les Accords d’Abraham semble s’inscrire dans cette stratégie régionale. D’après l’envoyé spécial américain pour le Moyen-Orient, Steve Whitcoff, Washington reste optimiste quant à une future normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël. Il estime également que le Liban et la Syrie pourraient suivre le mouvement, en raison des revers subis par les forces pro-iraniennes dans ces deux pays.

Le Liban et la Syrie apparaissent aujourd’hui comme des pions dans cette nouvelle équation régionale, alors qu’Israël poursuit ses violations du cessez-le-feu au Liban et que Beyrouth multiplie les démarches diplomatiques auprès des États-Unis, de la France et de l’ONU pour faire appliquer la résolution 1701 du Conseil de sécurité. Mais une crainte subsiste : qu’Israël exploite cette situation pour faire pression sur le Liban et l’amener à une normalisation forcée avec Tel-Aviv. Une stratégie qui pourrait également concerner la Syrie, où Israël renforce son occupation des hauteurs stratégiques du mont Hermon et de plusieurs localités au nord du Golan.

Le rôle de l’Iran demeure une question centrale. Washington semble pour l’instant privilégier une approche diplomatique dans le dossier nucléaire, malgré l’insistance d’Israël sur une action militaire contre Téhéran, perçue comme la principale menace du « front de la résistance ». Toutefois, la Chine et la Russie, partenaires stratégiques de l’Iran, freinent toute option militaire.

Face à cette incertitude, l’Iran se prépare à deux scénarios : une offensive militaire contre ses installations nucléaires et stratégiques, ou l’ouverture de négociations directes avec les États-Unis en vue d’un nouvel accord. L’administration américaine semble privilégier cette seconde option pour éviter une escalade régionale incontrôlable, susceptible de compromettre d’autres accords en cours. Notamment ceux concernant la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale, une condition posée par l’Arabie saoudite et soutenue par plusieurs États arabes, ainsi que par l’Iran.

Dans ce jeu d’alliances et d’intérêts, l’avenir du Moyen-Orient semble plus incertain que jamais, tandis que les grandes puissances redessinent les équilibres de la région dans l’ombre des négociations et des conflits en cours.