Les acteurs politiques libanais peinent à s’accorder sur la formation d’un gouvernement, dont l’une des missions prioritaires serait l’application de la résolution 1701. Israël, profitant de ces dissensions, refuse de se retirer des zones frontalières occupées lors de sa dernière offensive contre le Liban, en violation du cessez-le-feu conclu le 27 novembre dernier. Cet accord stipulait un retrait total de l’armée israélienne au sud du Litani sous 60 jours, permettant le déploiement de l’armée libanaise et de la FINUL sous supervision de la commission de surveillance dirigée par le général américain Jasper Jeffers. Parallèlement, le Hezbollah s’était engagé à se retirer militairement au nord du Litani et à démanteler toute infrastructure ou arsenal détecté dans cette zone, garantissant ainsi l’absence de toute présence armée en dehors des forces libanaises et de la FINUL.
Cependant, ce délai ayant expiré, Israël refuse toujours de se conformer, soutenue par une position américaine jugée compréhensive, voire complice. Elle exploite le blocage politique à Beyrouth pour poursuivre la destruction des localités frontalières qu’elle occupe, poussant même ses incursions au-delà du Litani et jusqu’à la Békaa. Prétextant que le Hezbollah continue de se réarmer, Tel-Aviv justifie son maintien sur le terrain. À ce jour, le parti chiite n’a riposté qu’une seule fois, visant les fermes de Chebaa, dans une tentative d’alerter à la fois la commission de surveillance et Israël elle-même sur la nécessité de respecter l’accord.
Sur le plan politique, la formation du gouvernement reste entravée par des calculs partisans. Bien que la communauté internationale ait imposé l’élection du président Joseph Aoun, les factions libanaises persistent à négocier dans l’attente d’éventuels bouleversements régionaux et internationaux. Un des points d’achoppement majeurs concerne l’attribution du ministère des Finances, revendiqué par le « duo chiite » au nom du « troisième paraphe » nécessaire à l’équilibre institutionnel. Si un accord semblait trouvé avec le Premier ministre désigné Nawaf Salam, des voix s’élèvent pour réclamer une alternance, arguant que le contexte actuel diffère de celui des précédents gouvernements.
En coulisses, certains estiment pourtant que cette question a été tranchée et validée par des acteurs étrangers influents. D’autres accusent le "duo chiite" de bloquer la formation du gouvernement en raison de son insistance sur ce portefeuille. Mais la véritable course au sein du futur cabinet vise avant tout les ministères stratégiques susceptibles de peser dans les législatives cruciales prévues au printemps 2026, qui se dérouleront sous un nouveau mode de scrutin proportionnel, tel que prévu par l’accord de Taëf.
Malgré les visites récentes des chefs de diplomatie saoudien et koweïtien, qui ont insisté sur l’urgence des réformes et l’accélération du processus gouvernemental, aucun progrès significatif n’a été constaté. Riyad et les pays du Golfe attendent la mise en place d’un gouvernement viable avant de débloquer une aide financière cruciale pour le Liban.
Dans ce contexte, les joutes verbales entre forces politiques, notamment entre le Hezbollah et les Forces libanaises, ne semblent pas ébranler la détermination d’Aoun et Salam à faire aboutir la formation du gouvernement. Cependant, un sentiment général prévaut : une intervention conjointe américano-saoudienne finira par imposer une issue, mettant un terme aux manœuvres dilatoires des parties locales, conscientes que la marge de manœuvre dont elles disposent s’amenuise inexorablement.