À 11 jours des élections présidentielles américaines, la course à la Maison-Blanche entre la démocrate Kamala Harris et le républicain Donald Trump devient de plus en plus serrée, rendant incertaines les prédictions sur celui qui succédera à Joe Biden le 20 janvier prochain. De nombreux politiciens et analystes s'accordent à dire que l'élection du 5 novembre pourrait être l'une des plus disputées de l'histoire des États-Unis, en raison de la polarisation politique et culturelle qui divise profondément le pays.

Cette élection survient dans un contexte où le Parti républicain, sous l’impulsion de Trump, est devenu plus radical, délaissant la droite traditionnelle. De l'autre côté, l’aile progressiste du Parti démocrate, inspirée par Bernie Sanders, gagne en influence. Étant donné les sondages partagés au niveau national entre Harris et Trump, l’attention se concentre désormais sur quelques États pivots qui décideront du vainqueur. Ces mêmes États avaient offert la victoire à Trump contre Hillary Clinton en 2016, puis à Biden en 2020. Cette fois, Harris doit relever un défi de taille pour remporter ces États stratégiques.

Les États pivots en jeu et la communauté arabe et musulmane

Sept États pivots sont cruciaux : l’Arizona, la Géorgie, le Michigan, la Pennsylvanie, le Wisconsin, le Nevada et la Caroline du Nord. Ces États abritent une proportion significative de progressistes ainsi qu’une importante communauté arabe et musulmane. En 2020, Biden avait obtenu 80 % des voix des musulmans démocrates et un soutien massif parmi les progressistes du parti. Cependant, ce soutien s’est érodé avant même son retrait de la course présidentielle en juillet dernier, principalement à cause de ses positions pro-israéliennes pendant la guerre à Gaza.

Ce mécontentement s'est exprimé lors des primaires démocrates, où des dizaines de milliers d'électeurs ont choisi l'option « non engagé » plutôt que de soutenir Biden. Harris a hérité de cette désapprobation après avoir été officiellement désignée candidate du Parti démocrate lors de la convention d’août à Chicago, marquée par des manifestations contre la guerre à Gaza.

Une tentative d’apaisement insuffisante

Pour calmer les protestataires, Harris a alterné entre des déclarations en faveur du droit des Palestiniens à l’autodétermination et l'affirmation qu'elle « n’était pas Joe Biden » et qu'elle ne poursuivrait pas sa politique au Moyen-Orient. Toutefois, en insistant sur le « droit d’Israël à se défendre », elle n’a pas réussi à convaincre les opposants à la politique de Biden, jugée trop complaisante face à la guerre en cours, qui s’est également étendue au Liban ces dernières semaines.

Les conséquences électorales de la politique de Biden

Harris pourrait-elle pâtir de cette politique ? Les chiffres montrent que c’est possible. En 2020, Biden avait remporté certains États pivots avec seulement quelques milliers de voix d’avance, notamment grâce au soutien des électeurs arabes et musulmans en Géorgie, au Michigan, en Pennsylvanie et au Wisconsin. Par exemple, Biden avait battu Trump dans le Michigan avec 154 000 voix d'écart, tandis que Trump avait remporté cet État en 2016 avec moins de 11 000 voix. Le Michigan compte plus de 200 000 électeurs musulmans enregistrés et 300 000 électeurs issus du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.

En Géorgie, où Biden avait gagné avec seulement 11 779 voix d’écart, des militants ont mobilisé 12 000 électeurs pour qu’ils s’abstiennent de voter pour Harris. Ils dénonçaient l’inaction de l’administration Biden face à la livraison d’armes à Israël et l'absence d’un cessez-le-feu durable à Gaza et en Cisjordanie.

Les efforts de dernière minute de l'administration Biden

Dans une tentative de répondre aux critiques, l’administration Biden a récemment envoyé un message à Israël, exigeant qu’il fournisse suffisamment de vivres à Gaza, sous peine de revoir son engagement envers le droit international humanitaire et potentiellement limiter les livraisons d'armes américaines. Cependant, cette initiative tardive semble insuffisante pour rallier les progressistes, les Arabes et les musulmans américains. Certains pourraient même choisir de voter pour Jill Stein, la candidate du Parti vert, en guise de protestation contre le Parti démocrate.

Les tentatives de Trump pour séduire les électeurs arabes et musulmans

De son côté, Trump redouble d’efforts pour attirer les électeurs arabes et musulmans, promettant de s'engager à trouver une solution au Moyen-Orient s’il est réélu. Toutefois, son bilan de président, marqué par l'abandon de la solution à deux États, la « transaction du siècle » et d'autres actions pro-israéliennes, joue en sa défaveur.