La candidate démocrate à l’élection présidentielle américaine, Kamala Harris, rencontre une difficulté majeure pour mobiliser les électeurs noirs masculins dans les États clés, ce qui l’a poussée à solliciter l’aide de l’ancien président Barack Obama, premier Afro-Américain à avoir accédé à la Maison-Blanche en 2008.

L’élection américaine, prévue le 5 novembre, s’annonce comme l’une des plus disputées de l’histoire du pays. Les sondages nationaux révèlent un écart de plus en plus réduit entre Harris et le candidat républicain Donald Trump, avec seulement trois points d’avance pour la vice-présidente, selon un sondage Reuters-Ipsos effectué en fin de semaine dernière, avec une marge d’erreur de quatre points. Les deux candidats se partagent les États clés comme l’Arizona, la Géorgie, le Michigan, la Pennsylvanie, le Wisconsin, le Nevada, la Caroline du Nord et le Minnesota, renforçant ainsi l’importance de chaque vote dans ces régions stratégiques. Harris et Trump redoublent d’efforts pour séduire les électeurs indécis dans ces États déterminants.

Contrairement aux femmes noires, de plus en plus d’hommes noirs et d’Américains d’origine latino soutiennent Trump, une tendance plus marquée qu’en 2016 et 2020. Sans une mobilisation massive de l’électorat noir, les chances de victoire de Harris s’amenuisent considérablement. Un sondage mené par le New York Times en collaboration avec l’institut de sondage Siena auprès des électeurs noirs masculins la semaine dernière révèle que l’ancien président républicain devance Harris avec 51 % des intentions de vote, contre 40 % pour la démocrate.

Une enquête menée en septembre par l’Association nationale pour l’avancement des personnes de couleur (NAACP), la plus grande organisation de défense des droits civiques aux États-Unis, montre qu’un quart des jeunes hommes noirs envisagent de soutenir Trump dans cette élection. Pourtant, lors de l’élection de 2020, Joe Biden avait récolté environ 80 % des voix des hommes noirs.

Cette situation préoccupe profondément les stratèges de la campagne de Harris et les démocrates en général. C’est ce qui a conduit Obama à intervenir en participant à un rassemblement à Pittsburgh, en Pennsylvanie, un État clé. S’adressant directement aux hommes noirs, l’ancien président a prononcé un discours sans détour : « Vous trouvez toutes sortes de raisons et d’excuses, et cela me pose problème… car cela me fait penser - en m’adressant directement aux hommes - (…) Vous n’êtes peut-être pas à l’aise avec l’idée d’une femme présidente. »

Obama avait déjà affirmé lors de la convention nationale démocrate à Chicago en août dernier que Harris représentait l’héritière politique du chemin qu’il avait tracé en 2008. Tout au long de leur carrière politique, les deux dirigeants se sont mutuellement soutenus. Harris avait été l’une des premières à soutenir Obama face à Hillary Clinton lors des primaires démocrates en 2007. En retour, Obama avait appuyé la candidature de Harris au poste de procureur général de Californie en 2010, la qualifiant de « précieuse amie ».

En plus du soutien d’Obama, auquel pourrait s’ajouter celui de l’ancien président Bill Clinton, Harris a rapidement annoncé de nouvelles propositions en faveur des hommes noirs, notamment l’élargissement de l’accès aux prêts pour les petites entreprises, assortis de possibles exonérations, ainsi que des réformes sur la légalisation de l’usage récréatif de la marijuana.

Les hommes noirs expriment une frustration croissante face à la montée de l’inflation et aux séquelles de la pandémie de Covid-19, alors que l’économie peine encore à se redresser. Pendant ce temps, Trump multiplie les messages flatteurs à l’égard de l’électorat noir, affirmant avoir « fait plus pour les Noirs que n’importe quel président depuis Abraham Lincoln », en évoquant la sortie de millions de personnes de la pauvreté et la hausse de la propriété immobilière chez les Noirs. Il ajoute : « Joe Biden, le fraudeur, n’a rien fait pour vous, à part parler. »

En plus de l’éloignement des électeurs noirs masculins, Harris doit aussi composer avec la désaffection des électeurs arabo-américains et musulmans, déçus du soutien inconditionnel de Joe Biden à Israël dans le cadre du conflit à Gaza et au Liban. Ces électeurs, qui avaient joué un rôle clé dans la victoire de Biden en 2020, déclarent aujourd’hui qu’ils ne voteront ni pour Biden ni pour Trump, préférant se rallier à Jill Stein, la candidate du Parti vert. Cependant, cette désaffection pourrait bien avantager Trump dans une course électorale aussi serrée.