Les Libanais, ainsi que le monde entier, attendent avec impatience le discours du secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hassan Nasrallah, cet après-midi du mardi 6 août 2024. Ce discours marque le septième jour depuis l'assassinat de Fouad Shukr, le numéro deux de la direction militaire du Hezbollah, lors d'une attaque israélienne sur un bâtiment à la banlieue sud de Beyrouth, qui a également coûté la vie à sept personnes, dont un expert militaire iranien. Ce discours est crucial pour déterminer la réponse attendue du Hezbollah suite à cette violation des lignes rouges par Israël et, parallèlement, l'assassinat d'Ismaïl Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, à Téhéran. Ces événements ont suscité des spéculations et des craintes quant à une possible guerre régionale.
Il est indéniable que l'Iran et le Hezbollah se trouvent dans une position délicate, nécessitant une réponse. Toutefois, la question demeure quant à l'ampleur de cette riposte et si elle entraînera une contre-attaque israélienne, menant à une guerre régionale. Ce scénario dépendra non seulement de la volonté des acteurs régionaux, mais également des efforts des grandes puissances pour contenir un tel conflit.
En ce qui concerne le Hezbollah, il est contraint de répondre à l'assassinat de Shukr en ciblant une cible militaire ou stratégique israélienne de manière significative. Le parti pourrait ainsi viser un site militaire ou économique stratégique à Haïfa, voire au-delà. Cependant, le Hezbollah ne cherche pas à escalader le conflit, mais à restaurer la dissuasion avec Israël, tout en maintenant le conflit dans les limites définies au cours des dix derniers mois. Les considérations internes au Liban incitent également le parti à éviter un conflit total avec Israël.
Pour l'Iran, la situation est plus complexe. L'assassinat d'Ismaïl Haniyeh sur son territoire, en plein cœur de Téhéran, lors de l'investiture du nouveau président, constitue une atteinte à sa souveraineté et à sa sécurité nationale. Cela soulève la question de savoir si Israël peut cibler des personnalités iraniennes de haut rang. Le Hezbollah a également qualifié cet assassinat d'insulte à l'honneur iranien, ce qui rend une réponse iranienne inévitable. Néanmoins, il est peu probable que l'Iran cherche une escalade menant à une guerre régionale. Une réponse iranienne distincte des actions du Hezbollah ou d'autres factions de la résistance en Irak ou au Yémen est à prévoir, afin de ne pas donner l'impression que ces factions ne sont que des marionnettes de l'Iran.
Quant aux factions de la résistance, chacune a ses propres griefs contre Israël. Le Yémen, par exemple, se prépare à répondre à l'agression israélienne sur al-Hudaydah, tandis que les factions irakiennes pourraient se joindre au Hezbollah pour une riposte coordonnée, sans pour autant attaquer les bases américaines, afin de ne pas donner à Benjamin Netanyahu un prétexte pour entraîner les États-Unis dans une guerre régionale.
Pour Netanyahu, les assassinats de Shukr et Haniyeh ont permis de marquer des points politiques, renforçant sa position intérieure et augmentant sa popularité, comme l'indiquent les sondages. En mettant fin aux négociations de cessez-le-feu menées par Haniyeh, Netanyahu espère continuer les hostilités contre Gaza, tout en espérant un soutien accru de Donald Trump s'il revient à la Maison Blanche.
Quant aux États-Unis, il est clair que Netanyahu n'aurait pas agi sans un feu vert américain, qui pourrait provenir de l'establishment ou des réseaux profonds avec lesquels il a des liens. Cependant, les États-Unis n'ont pas intérêt à une escalade, surtout en raison des implications économiques négatives d'une guerre régionale, notamment sur les prix du pétrole.
La Russie, quant à elle, semble concernée par les développements dans la région. L'accueil du président syrien Bachar al-Assad à Moscou, juste avant les assassinats, indique que la Russie anticipait une escalade. Bien que Moscou ne souhaite pas une intensification des tensions au Moyen-Orient, elle ne veut pas non plus voir l'Iran ou ses alliés de la résistance affaiblis, car cela pourrait nuire à ses intérêts stratégiques, y compris en Ukraine.
En conclusion, malgré les tensions, la plupart des acteurs, à l'exception de Netanyahu, n'ont pas intérêt à une escalade majeure menant à une guerre régionale. Cependant, des facteurs irrationnels pourraient-ils précipiter une telle confrontation, qui pourrait se transformer en conflit mondial ?