L’hiver social risque d’être chaud pour le gouvernement français . Même si habituellement c’est plutôt la rentrée sociale qui est annoncée comme mouvementée à Paris, la multiplication des grèves met la pression sur le Premier ministre, Michel Barnier. Face à un gouvernement d’une infinie fragilité, une crise sociale menace d’exploser dans un pays déjà perclus de crises en tous genres depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron .

Les syndicats de la SNCF ( groupe public du rail ) ont appelé à une grève illimitée à partir du 11 décembre pour réclamer un moratoire contre ce qu’ils nomment le « démantèlement annoncé de Fret SNCF ». En réalité, le Fret français est en d’une grande fragilité depuis des années. Le concurrent allemand de la SNCF, la Deutsche Bahn a racheté , depuis belle lurette, partout en Europe des sociétés de Fret. À une époque récente , Eurotunnel ou le groupe Colas avaient acheté, eux, des licences de Fret pour ouvrir à des sociétés privées françaises une alternative au fret public. Les syndicats n’ont évidemment pas laissé faire. Pour eux , la SNCF doit rester un monopole même si des lignes de voyageurs ont été ouvertes à la concurrence. Donc cette fois , le syndicat Sud-Rail en tête prend le prétexte de l’avenir du Fret SNCF pour imposer le chantage d’une nouvelle grève aux Français qui se réunissent en familles pour fêter Noël et les fêtes de fin d’année. La patience des Français atteindra-t’elle un jour ses limites ? Sur le départ , l’actuel Président du groupe ferroviaire, Jean-Pierre Farandou, ne connaît toujours pas le nom de son successeur. Les partenaires sociaux profitent de l’actuelle « vacance du pouvoir » à la SNCF.

De son côté, le puissant Syndicat des pilotes de ligne s’agite contre la volonté du gouvernement Barnier de prélever un milliard supplémentaire par an sur le secteur aérien. Une nouvelle taxe sur les compagnies aériennes est prévue au budget 2025 alors que déjà sur un vol intérieur, le billet supporte pas loin de 25% de taxes ! Et 10% pour les vols longs courriers… Cette nouvelle taxe va-t-elle détourner une partie du trafic aérien vers le hub néerlandais de Schiphol ? Les salariés de l’aérien français le craignent.

Autre mouvement de grogne sociale, la sphère publique. Les fonctionnaires, eux, refusent , en effet, les trois jours de carences en cas d’arrêts maladie que veut mettre en place leur ministre de tutelle. «En décembre, on va prendre le jeu du ministre au mot : trois jours de carence, trois jours de grève », a lancé Christian Grolier, secrétaire général de l’UIAFP-FO, ».

De leurs côtés, les agriculteurs se mobilisent contre le traité du Mercosur qui va être signé par Bruxelles, lors du prochain G20 de Rio de Janeiro. Ce traité de libre échange risquerait de laisser en Europe entrer des produits alimentaires qui ne respectent pas les normes sanitaires que l’on impose à nos propres agriculteurs !Terrifiant. « Ce n’est pas vrai », réplique la Commission européenne. « Les mêmes normes sanitaires s’appliqueront pour tous les produits sud-américains »

L’agriculture française souffre . Les récoltes ont été mauvaises cette année , les épizooties sur le bétail sont nombreuses . Les agriculteurs veulent vivre décemment de leur travail. Leur colère est intacte depuis le salon de l’Agriculture de Paris. La mobilisation agricole va revenir comme un boomerang dans les vitres de l’Elysée et de Matignon. Cette mobilisation risque d’être d’autant plus forte que des Élections aux chambres d’agriculture sont programmées au début de 2025. Le face à face entre la Fnsea et la Coordination rurale va être violent dans les urnes syndicales , avec le Modef ou les Jeunes Agriculteurs, en arbitres . Cette élection dans le monde paysan pourrait redessiner les contours des relations entre le pouvoir français et le monde agricole du pays.

Cheminots, fonctionnaires, agriculteurs, pilotes de ligne, la grogne sociale peut s’enflammer de nouveau en France . Une crise sociale que ni l’Elysée ni Matignon, par faiblesse politique, ne seraient en mesure de circonscrire .