La somme est colossale ! 950 milliards d’euros. …Cette somme, calculée par l’Observatoire européen de la fiscalité, correspond aux profits transférés par des grandes entreprises multinationales dans des paradis fiscaux et cela pour la seule année 2022….Evasion fiscale et optimisation fiscale vont bon train. Au moment où les États, dont les budgets ont été parfois vidés par le financement de la crise Covid, cherchent à remplir leurs caisses , mieux taxer les profits des multinationales est une nécessité économique de premier ordre. Pour bien comprendre les enjeux colossaux que représente cette somme…950 milliards d’euros, c’est l’addition de la richesse annuelle créée par deux pays comme le Danemark et de la Belgique réunis. Pas moins. Parmi, les grandes entreprises qui se livrent aux pays du mieux disant fiscal, les championnes du genre sont les multinationales américaines ! !! Elle transfèrent près de la moitié de leurs profits étrangers dans des paradis fiscaux, contre 30 % pour les autres multinationales notamment européennes ! Du côté des paradis fiscaux qui abritent les profits des grandes entreprises , on trouve beaucoup de pays européens comme l’Irlande, les Pays-Bas , le Luxembourg ou même la Suisse qui n’appartient pas à l’Union Economique et Monétaire… Pourquoi tant de pays européens ? Parce justement en Europe, il n’y a pas d’harmonisation fiscale… et que beaucoup, comme l’Irlande affiche une fiscalité faible justement pour attirer les entreprises et leurs sièges sociaux ! L’impôt sur les sociétés y plafonne à 12,5% ! Oui, l’Europe est aussi une « passoire fiscale». Bon, il y a aussi les champions mondiaux des paradis fiscaux comme les îles Vierges ou les îles Caïmans…où le secret bancaire règne en maître absolu !
Pour remédier à cet état de fait, les pays les plus riches et d’autres encore avaient pris une grande décision, il y a deux ans. En 2021, plus de cent quarante pays avaient, en effet, instauré un impôt minimum de 15 % sur les sociétés, sous l’égide de l’OCDE…Cet accord avait été célébré comme une victoire avec roulements de tambour, notamment en France par Bruno Lemaire. Cet accord, qui doit entrer en vigueur en 2024, devait justement mettre un terme à cette course à l’évasion fiscale…Mais depuis, cet accord a été vidé de sa substance par une série de niches et d’exonérations… Et puis n’oublions pas aussi le paquet de subventions américaines, le fameux Inflation Reduction Act qui, au niveau des entreprises distord, notamment, la concurrence fiscale. Selon des statistiques fédérales américaines, l'IRA a provoqué une explosion des annonces d'investissements industriels dans le pays. Même au pays du libéralisme proclamé peut-on lui en vouloir de protéger son industrie au nom d’un patriotisme économique que l’Europe a abandonné ?
La justesse de la fiscalité sur les multinationales ou les plus riches reste une question de justice mais aussi une question économique centrale pour nombre d’Etats, comme le nôtre, si lourdement endetté. Au niveau des Etats de l’Union européenne, l’ONG Tax Justice Network évalue à 119 milliards d’euros par an la perte de recettes liée à l’évasion fiscale, dont plus de 31 milliards pour la France. Le plus gros contributeur !