De Beyrouth à Mascate, en passant par tous les points névralgiques de la région, le Moyen-Orient retient son souffle. Tous les regards sont désormais tournés vers les négociations entre les États-Unis et l’Iran, des pourparlers susceptibles de déterminer l’issue politique des multiples conflits opposant l’axe occidental à l’axe iranien depuis l’opération « Déluge d’Al-Aqsa » du 7 octobre 2023.
Selon des sources diplomatiques, le premier round des négociations à Mascate a été « positif ». Les deux parties ont exprimé leur volonté de poursuivre les discussions — un signe évident que parvenir à un accord est dans leur intérêt commun. L’alternative serait trop coûteuse pour l’un comme pour l’autre. Seul Israël semble privilégier l’affrontement, considérant l’Iran et ses alliés comme une menace existentielle et estimant que le moment est propice à une frappe décisive, surtout après les coups sévères reçus au Liban, à Gaza, en Syrie, au Yémen, et même sur son propre territoire.
Les informations initiales indiquent que les discussions ont porté principalement sur le programme nucléaire iranien et une éventuelle levée partielle des sanctions américaines et occidentales. Téhéran a clairement fait savoir qu’il ne discuterait ni de son influence régionale ni de ses capacités balistiques tant qu’un accord sur le nucléaire et les sanctions n’est pas conclu — en particulier celles visant des entités clés et le secteur pétrolier. Pour l’Iran, l’allègement des sanctions est un test de la sincérité américaine. Ce n’est qu’après cette étape que Téhéran accepterait d’entamer des négociations bilatérales directes avec Washington.
Du côté américain, l’objectif est clair : contenir les capacités balistiques et aérospatiales de l’Iran, perçues comme une menace directe pour la sécurité d’Israël et les intérêts américains dans la région. Bien que Washington ne croit pas à une militarisation du programme nucléaire iranien, il exige des garanties contre le risque que représentent les missiles iraniens. Cette exigence s’inscrit dans le cadre du soutien indéfectible des États-Unis à Israël, notamment depuis le 7 octobre, un soutien que Tel Aviv considère comme vital à sa survie.
Les négociateurs américains estiment que l’Iran n’aura d’autre choix que de parvenir à un accord. Une confrontation militaire avec les États-Unis pourrait ébranler le régime iranien, d’autant que ses alliés régionaux sont actuellement affaiblis par de lourdes pertes et tentent de se reconstruire.
Mais selon des sources diplomatiques, l’Iran est disposé à accepter un accord sur son programme nucléaire incluant une surveillance internationale rigoureuse et permanente. En revanche, il refuse catégoriquement d’abandonner ses capacités balistiques stratégiques, conçues à l’origine pour protéger ce même programme nucléaire. De même, il n’est pas prêt à renoncer à ses alliances régionales, sauf en cas de nécessité absolue — et encore, dans des conditions qui ne fragiliseraient pas sa position stratégique.
Pour bien comprendre le contexte des discussions de Mascate, il faut revenir à la rencontre de plus de quatre heures à Moscou entre le président russe Vladimir Poutine et l’envoyé spécial américain au Moyen-Orient, Steven Witkoff, juste avant son départ pour Mascate. Il faut aussi prendre en compte les récentes consultations entre Téhéran, Moscou et Pékin, et évaluer le degré de soutien que la Russie et la Chine sont prêtes à offrir à leur alliée iranienne dans ses négociations avec Washington.
À l’issue de ce premier round, les deux parties ont affiché un certain optimisme. La Maison Blanche a qualifié les pourparlers de « très positifs et constructifs », tandis que Witkoff a affirmé au chef de la délégation iranienne, le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi, qu’il agissait sur instruction directe du président Donald Trump afin de résoudre les différends par le dialogue, si cela est possible. Araghchi, de son côté, a déclaré que l’Iran et les États-Unis étaient « très proches » d’un accord sur les bases des négociations futures, dans un climat « positif et constructif ».
Dans un geste symbolique, Araghchi et Witkoff ont tenu une brève discussion en tête-à-tête de cinq minutes à l’issue de la séance, en présence du ministre omanais des Affaires étrangères — un pas vers des échanges plus directs à venir.
En résumé, Mascate a permis de sonder les intentions des deux camps. Les résultats semblent suffisamment prometteurs pour qu’un second round soit déjà prévu le samedi suivant. Ces pourparlers se tiennent dans un climat régional et international tendu, marqué par des menaces militaires américaines, la poursuite des frappes sur les Houthis au Yémen, et une guerre israélienne persistante — bien que moins intense — contre deux des principaux alliés de l’Iran : le Hezbollah au Liban et le Hamas à Gaza.
Sauf revirement, les négociations devraient se poursuivre chaque samedi à Oman — ou ailleurs si besoin. Le président Trump presse pour des résultats rapides, positifs ou non. Car si le tonnerre gronde sur le Moyen-Orient, la pluie, elle, tombera sans doute… en mer de Chine.