L'approche américaine visant à impliquer le Brésil dans les discussions non officielles avec Cuba n'est pas sans risques et obstacles
Cuba... Nichée dans la région caribéenne, à l'entrée du golfe du Mexique, se dresse la République socialiste de Cuba, gouvernée par un parti unique. À quelque 150 kilomètres des côtes américaines, elle partage un voisinage sensible avec les États-Unis par l'intermédiaire de la Floride, où se trouve le quartier général du commandement militaire sud et central américain. Depuis l'avènement de la révolution castriste au pouvoir le 1er janvier 1959, Washington la considère comme une menace sérieuse. Cette inquiétude a atteint son paroxysme en 1962, en particulier le 16 octobre lors de la crise des missiles cubains. Ce moment a figé le monde pendant 13 jours, au bord du précipice d'une guerre nucléaire, lorsque Washington a révélé le déploiement secret de missiles soviétiques sur le sol cubain. Actuellement, selon les autorités américaines, la Chine et Cuba tissant des liens et les nouvelles manœuvres diplomatiques entre Cuba et la Russie représentent la plus grande menace pour les États-Unis.
Dans cette optique, à la demande de Washington, le Brésil a amorcé une démarche visant à sonder les intentions de La Havane. Cette initiative vise à raviver les tentatives de rapprochement entre les États-Unis et Cuba. Elle s'inscrit dans une stratégie visant à réinscrire l'Amérique dans l'arène compétitive cubaine, avec pour objectif de contenir l'influence grandissante de la Chine et de la Russie.
La "Nation cubaine", en dépit de ses dimensions modestes et de ses ressources naturelles quasi inexistantes, occupe une position géographique critique. Celle-ci en fait une cible stratégique pour toute activité militaire ou de renseignement ciblant les États-Unis. Dans cette perspective, Cuba a besoin du soutien d'une puissance étrangère solide pour satisfaire les besoins vitaux de sa population. Cela devient crucial à mesure que le mécontentement général envers un gouvernement sous pression et les menaces de manifestations s'intensifient. Les défis économiques auxquels le pays fait face ont suscité de profondes inquiétudes au sein du gouvernement cubain.
Cuba navigue en eaux troubles au milieu d'une crise énergétique aiguë depuis le début de l'année
Cuba, l'une des plus grandes îles de la région caribéenne, avec une superficie de 110 000 kilomètres carrés et la deuxième en termes de population avec 11 millions d'habitants, pâtit des effets persistants du blocus économique américain. Malgré l'ouverture plus récente des États-Unis envers l'île, le taux d'inflation dépasse désormais les 40 % selon les rapports officiels. Le pays se heurte à une grave pénurie de denrées alimentaires et de médicaments, ainsi qu'à des coupures d'électricité régulières. Les prix ont grimpé de 45,8 % en glissement annuel en juillet dernier, révèle le ministère de l'Économie. À noter que le salaire moyen à Cuba se situe aux alentours de 5000 pesos par mois, soit environ 29 dollars américains.
Alors que Cuba navigue en eaux troubles au milieu d'une crise énergétique aiguë depuis le début de l'année, sa propre production pétrolière ne parvient qu'à couvrir un tiers de sa demande en carburant. Dans cette épreuve, l'île dépend du soutien énergétique russe pour ne pas sombrer. Plus récemment, Cuba a entrepris de puiser dans les ressources pétrolières mexicaines pour alléger son fardeau. Cependant, une observation intéressante émane des experts en économie : ce pétrole remplace en quelque sorte les revenus que le pays aurait pu obtenir en échange des services de ses médecins travaillant au Mexique. Cette décision de puiser dans les réserves pétrolières renvoie au besoin croissant de professionnels de la santé, alors que les statistiques font état de la présence de pas moins de 70 000 médecins à Cuba, une disproportion frappante par rapport à la taille de la population.
Dans ce contexte, le mode opératoire des États-Unis vis-à-vis de Cuba reste enveloppé d'incertitudes. Si Washington dispose d'un arsenal de leviers pour manœuvrer la situation, incluant des mesures d'assouplissement, la levée de sanctions et des ouvertures à la coopération économique, la stratégie précise demeure difficile à discerner. Dans la foulée des initiatives de l'ancien président Barack Obama en 2014, l'administration de Joe Biden a œuvré l'année passée pour améliorer les relations avec La Havane. Cela s'est traduit par des pourparlers au niveau gouvernemental de second rang et des propositions de levée partielle des contraintes économiques.
Obama avait alors marqué l'histoire en devenant le premier président américain depuis 1959 à poser pied sur le sol cubain. Cette visite avait permis une rencontre entre Obama et l'ancien président cubain Raul Castro, aboutissant à la réouverture des ambassades des deux nations.
Dans la perspective américaine, la facilitation de ces pourparlers – que ce soit par des moyens directs ou par l'intermédiaire de canaux plus informels, comme via le Brésil qui s'est porté volontaire avec l'aval de Washington – pourrait éclairer les chemins vers la résolution des défis majeurs auxquels Cuba fait face. Cela inclut notamment le renforcement des systèmes de santé et agricoles. Cependant, une implication plus profonde de Cuba envers les États-Unis semble peu probable.
L'approche américaine visant à impliquer le Brésil dans les discussions non officielles avec Cuba n'est pas sans risques et obstacles. Dans cette dynamique, Washington se doit d'abord d'équilibrer la balance et de travailler à lever les entraves économiques pesant sur l'île. C'est seulement après ces étapes qu'il serait envisageable de se positionner en tant que concurrent face à la Russie et à la Chine, bien que ce ne soit pas l'objectif immédiat. Tout cela amène les États-Unis à compter sur la collaboration du Brésil pour saisir cette opportunité unique. Ces derniers considèrent le Brésil comme un acteur de transition, susceptible d'ouvrir graduellement l'île sur les plans économique et politique. Le plan américain consiste à intervenir au moment propice. La question demeure : réussiront-ils à concrétiser cette stratégie ?